Pâques, comme d’autres grandes fêtes chrétiennes, pourrait être l’occasion pour les médias d’ajouter à leurs principes déontologiques une règle qui fait encore cruellement défaut : l’exigence du respect de la vérité historique.
Ceci visant surtout les rapports avec la chrétienté car c’est la seule religion qui a eu l’idée saugrenue de chercher à faire entrer un personnage de sa mythologie dans l’histoire.
Cette idée était, on en conviendra, à la fois bonne et mauvaise.
Bonne parce que pendant pas mal de siècles l’ignorance et l’inculture des hommes permettaient de faire croire à peu près n’importe quoi sans prendre de risques inconsidérés, ce dont on ne se priva pas… Mauvaise car il était prévisible que tôt ou tard les peuples se libèreraient du joug de l’Église, pourraient se cultiver, accéder à la vérité historique et seraient de plus en plus sceptiques devant ces constructions fantaisistes.
D’ailleurs cette doctrine qui semble aujourd’hui avoir toujours eu le contenu qu’on lui connaît est faite, on le sait, de bouts et de morceaux rassemblés au fil des temps. Ainsi Jésus, au début, ne fut imaginé par les promoteurs de la nouvelle foi que comme le héros destiné à personnaliser la nouvelle morale qu’ils voulaient promouvoir. Et il ne fut longtemps considéré que comme un prophète parmi d’autres et nullement comme fils de Dieu !
Personne ne peut croire non plus de nos jours à l’immaculée conception et autres fadaises de ce type, pas plus qu’à cette Assomption que Pie XII, sorti de sa longue torpeur de la guerre, inventa en 1950, frappé semble-t-il par l’urgence de mettre en valeur une caractéristique d’une telle importance négligée pendant deux millénaires…
On sait aussi que la date de Noël a été choisie arbitrairement au 4ème siècle, pour substituer une fête religieuse à des réjouissances païennes, et que le Golgotha et tout le rituel pleurnichard qui l’entoure seraient dus à l’imagination de l’inventive sainte Hellène, mère de Constantin (v. M. Onfray : ‘’Traité d’athéologie’’, p. 147).
Cela dit, on ne peut mettre plus dans l’embarras un ecclésiastique, quel que soit son niveau, qu’en lui demandant de quelles preuves historiques irréfutables il dispose pour étayer ses assertions que Jésus a bien eu une existence réelle et qu’il a vraiment été arrêté, condamné et supplicié.
On a droit en général, quand l’intéressé se risque à répondre à un salmigondis où surnagent des extraits de textes latins qu’on torture pour leur faire dire ce qu’on veut, ou à de soi-disant témoignages qui sont plutôt du genre : « l’homme qui a vu l’homme, qui a vu l’homme, qui… » et surtout au conseil de faire confiance et de croire qui est le chemin le plus court pour ne pas se torturer avec des questions inutiles…
Ceux qui ne répondent pas se retranchent en général derrière la liberté de croire, parce qu’ils n’ont pas, semble-t-il, l’intelligence suffisante pour comprendre que croire est une chose et prétendre à la réalité d’un événement une autre. La croyance est laissée au libre choix de chacun, tandis que l’histoire s’impose à tous, à condition d’être avérée ! Si, par exemple, un hindouiste me dit qu’il croit en Krishna, je pense que c’est son problème, qu’il est entièrement libre et que cela n’implique aucune reconnaissance de cette conception de ma part.
Par contre si on me disait que Jésus avait débarqué sur terre il y a deux mille ans et qu’on soit capable d’en donner des preuves suffisantes je devrais, si ces preuves étaient convaincantes, accepter ce fait comme une donnée historique.
Une telle confirmation n’a évidemment aucune chance de se réaliser. Mais on peut considérer que c’est une chance pour l’Église car si elle l’était cela lui poserait plus de problèmes qu’il n’en serait résolu. Elle a donc tout intérêt à rester dans le vague et à laisser planer le doute…
Imaginons en effet qu’on trouve quelques indications qu’un citoyen nommé Jésus, un agité, un faiseur de miracles, un bateleur, un thaumaturge, ait vécu dans cette période éloignée. Il faudrait ensuite faire croire qu’il s’agissait d’un dieu. Puis prouver également qu’il avait accompli tous les prodiges qu’on lui prête, toutes choses dont il n’existe aucune trace. Et enfin qu’il aurait été trucidé, mais serait ressuscité, alors qu’aucun témoignage n’a à ce jour corroboré cette invraisemblable histoire…
Franchement, malgré le peu d’empathie que nous ayons pour le clergé, on ne peut lui souhaiter de se retrouver avec une histoire encore plus vasouillarde que celle qu’il a déjà sur les bras…
Une chose est sûre en tout cas, c’est qu’on ne peut se soustraire à l’obligation de respecter la vérité, à commencer par la vérité historique. Pour autant, cela n’est en aucune façon une manière de restreindre la liberté de croire. Simplement les croyants ne peuvent arguer de la vérité d’un fait, prétendu réel, s’ils ne sont pas capables de le prouver. Pour le reste qu’ils croient en Dieu ou non est leur affaire, pas la nôtre…
Ainsi le retour nécessaire au respect des règles élémentaires de la laïcité, pourrait débuter de la façon la plus simple qui soit pour les médias en insistant simplement lors de chaque compte-rendu de ces cérémonies sur le fait qu’elles ne sont que des commémorations d’épisodes appartenant à des croyances religieuses. Épisodes dont il serait utile de préciser qu’ils sont tout à fait hypothétiques puisqu’ils n’ont jamais reçu de confirmation historique irréfutable.
On peut supposer que cette prise de position d’ailleurs parfaitement légitime, inciterait l’Église à réagir, mais certainement avec plus de mollesse qu’on pourrait le supposer, car a-t-elle vraiment intérêt à ouvrir une diatribe alors qu’elle ne dispose d’aucun éléments crédibles pour démontrer le bien fondé de ses affirmations ?
Cela conduirait à une remise à sa place de cette religion parmi les autres et au même niveau. On ne voit pas très bien en effet ce qui pourrait contraindre à traiter cette organisation autrement que comme la simple croyance qu’elle est. L’opération est d’ailleurs d’autant plus justifiée que de plus en plus de ceux qui constituaient autrefois sa clientèle ne prennent plus au sérieux cette mythologie surannée, et que ce combat d’arrière-garde est, à l’évidence, un combat perdu d’avance. En outre, et pour rester un peu conséquent sur un plan global, il est clair aussi qu’on aurait sans doute du mal à trouver plus de cinq pour cents de l’humanité qui accordent quelque vraisemblance à cette doctrine controversée ! Pourquoi donc lui accorderait-on plus qu’à d’autres, une ‘’aura’’ que rien ne justifie et qui ne satisfait en outre qu’une infime minorité de ceux qui en ont connaissance ?
Ce rééquilibrage réalisé et le clergé ramené à moins de prétention quant à sa doctrine, nous pourrons alors passer à autre chose. Par exemple, nous intéresser d’un peu plus près aux multiples incursions de l’Église sur le terrain des autres : lorsqu’elle intervient dans des domaines où la décision ne lui appartient pas, qu’elle veut s’opposer à des dispositions légales prises démocratiquement, ou se mêle de donner des leçons de toutes natures, comme si elle avait les qualités requises pour cela. Dans tous ces cas nous pourrions lui rappeler l’obligation d’être d’abord exemplaire, de commencer par appliquer elle-même sa propre morale et d’obtenir au moins de son personnel qu’il respecte ses engagements solennels et les règles strictes (non homosexualité et non pédophilie, par exemple) régissant leur conduite. Tout ceci étant toujours resté lettre morte ce qui ridiculise le pape qui cherche à convaincre, et à se convaincre, qu’il est obéi…
Bien entendu nous pourrons étayer nos argumentations de tous les documents et témoignages du passé à notre disposition ainsi que de toutes les informations qui jour après jour nous confirment que depuis les origines et jusqu’à notre époque cette entreprise, qui se prétend caritative, n’a agi que pour servir ses propres intérêts, tandis que son personnel a de tout temps été parfaitement indigne.
Étant donné l’ampleur du problème, nous avons infiniment plus de chances qu’un jour l’Église retourne à l’état d’une secte insignifiante et ayant perdu toute influence, que de la voir surmonter toutes ses tares, se réorganiser de fond en comble et reprendre en mains ceux qui la servent. C’est-à-dire qu’elle devienne enfin propre et son personnel à peu près respectable !
Pendant que ces bons princes s’occuperont de leur hypothétique survie, cela nous laissera tout le temps nécessaire pour nous organiser tranquillement, sans eux ! ! !
Agnos
avec quel courage extraordinaire et quelle finesse intellectuelle vous vous en prenez au catholicisme ! Bravo pour votre témérité; maintenant, j'aimerais vous voir écrire contre d'autres religions. Par exemple, et pour s'en tenir aux grandes religions qui cohabitent en France : l'islam et le judaïsme. Comment expliquez-vous cela ?
Rédigé par : Paul | 27 mars 2008 à 18:08
J'ai lu, il y a quelque temps, le témoignage d'un prêtre qui avait l'honnêteté d'avouer l'absence de preuve formelle concernant l'existence de Jésus. On peut penser qu'il n'est pas le seul à reconnaître ce fait. D'autre part Pie XII a dit que la croyance en Jésus, personnage historique, était une affaire de Foi.
Rédigé par : Florence PIGOREAU | 09 mars 2009 à 19:57